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À la poursuite des fuites

En France chaque année, 1 litre sur 5 est perdu au travers des fuites. Cela représente 937 millions de m3 d’eau potable, l’équivalent de la consommation annuelle d’environ 18 millions d’habitants, qui ne sont pas facturés. Avec un prix moyen de l’eau à 3,5 €, c’est près de 3,3 milliards de pertes annuelles pour les opérateurs.

Malgré ce constat alarmant, un discours persiste : celui qui consiste à dire que l’eau des fuites n’est pas perdu, puisqu’il retourne au milieu naturel. Certes, cela n’est pas faux, toutefois certaines considérations sont à prendre en compte dans cette situation.

Comme le souligne Marillys Macé (Directrice générale du Centre d’Information sur l’Eau) dans un entretien au Figaro, « le problème, c’est qu’elle est indisponible pendant un certain temps, et notamment à des moments où on en a besoin, comme maintenant». Pour illustrer l’accentuation de cette pression sur la ressource ont peut considérer la situation des eaux souterraines.  La recharge des nappes est tributaire des pluies d’automne et d’hiver, là où la végétation est plus réduite et permet une bonne infiltration des eaux vers les nappes. Depuis, on assiste à un enchaînement d’années sèches ou de pluies concentrées aux périodes de printemps et d’été. La végétation développée pendant ces périodes prélève alors à elle seule d’importantes quantités d’eau, ce qui ne permet plus la recharge des nappes. De plus, les températures élevées constatées au printemps ou en automne permettent à la végétation de se développer plus tôt et de se maintenir plus tard. Cela accentue encore l’évapotranspiration (processus par lequel l’eau liquide est renvoyée dans l’atmosphère environnant sous forme gazeuse) au sein du grand cycle de l’eau. Le résultat est que le temps de recharge efficace des nappes, auparavant de cinq à six mois, n’est plus que de deux à trois mois, réduisant la quantité d’eau infiltrée de 15 à 25% selon les années.

Les dépenses pour la potabilisation de cette ressource sont quant à elles perdues avec potentiellement un risque de rejet d’une eau chlorée dans les milieux naturels. De plus les fuites des canalisations d’eau peuvent aussi laisser entrer des contaminants potentiellement dangereux dans notre eau potable. La pression dans les conduites d’eau principales force généralement l’eau à sortir par les fuites, empêchant ainsi toute autre chose de s’infiltrer. Mais lorsqu’il y a une chute de pression importante dans une section endommagée de la conduite, l’eau entourant la conduite peut être aspirée par le trou. Elles aspirent donc de l’eau sale et contaminée qui est ensuite distribuée dans les robinets. Cette eau contaminée peut entraîner des troubles gastriques et d’autres problèmes de santé.

Pour pallier à ces risques, l’action principale est le renouvellement des canalisations. Avec un taux de renouvellement annuel de 0,61 % selon le dernier rapport FP2E (Fédération Professionnelle des Entreprises de l’Eau)/BIPE (Bureau d’Information et de Précisions Économiques), plus d’un centenaire serait nécessaire à la rénovation des 850.000 km du réseau d’eau potable français. Avec une baisse de 9% des recettes des Agences de l’eau prévue pour la période 2019-2024, par rapport à celle de 2013-2018, le financement de ces travaux est toujours complexe. Notamment pour les petits services en zones rurales qui ont pourtant souvent besoin de réaliser le plus d’effort pour améliorer leurs rendements.

L’action de tous sera nécessaire pour faire face à cet enjeux mondial, accentué par le changement climatique. Toutefois, un financement, à plus grande échelle, des projets innovants dans le domaine de l’eau pourrait être un levier de taille pour faciliter une gestion durable de cette ressource précieuse.

 

L’équipe Save Innovations